Un ciel gris surmontait l’université. Et moi je me réveillait doucement. Il est exactement 7h du matin. Je me lève, m’habille, et sort des dortoirs, pour aller en cours. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression qu’il me manque quelque chose. Je n’y prête pas plus attention, et passe ma journée, tranquille, à travailler, à dessiner, à photographier… Bref comme toutes mes journées, je suis là, souriante, riant avec mes camarades et trouvant tout ça vraiment agréable. Mais j’ai encore cette vague impression qu’il y a quelque chose en moins dans mon sac.

De nouveau je n’y prête pas attention. Et puis je vois plus loin passer une tête. Un garçon plus exactement. Enfin… Pour être même encore plus précise, c’était ce footballeur qui avait fait chaviré mon cœur que je voyais là-bas au loin. J’allais retourner à la bibliothèque à ce moment-là, mais comme d’habitude, j’avais arrêté ma route, et me préparait à m’armer de mon crayon de carbone et de mon carnet… Seulement j’aurai pu le faire si mon carnet était dans mon sac. Je m’accroupis au sol, ne le trouvant pas dans mon sac à tâtons. Je vidais le contenu poignée par poignée, mais ne le trouvais toujours pas dedans. Il était absent.

Ce n’est pas possible ?! Impensable ?! Même pas imaginable ! J’étais sûre d’avoir ce carnet dans mon sac ! Je suis en mode panique là. Mon petit carnet fétiche a quitté mon sac sans mon autorisation. Il a bien dû tomber quelque part ?! En plus il risque bientôt de pleuvoir. J’ai bien pu l’oublier quelque part ! En plus c’est… Un peu de mes petits secrets… Fin surtout un secret très important… Qu’il y a dedans. Et je ne vois pas du tout comment j’ai pu le perdre. C’était la panique totale. Je respirais très vite, mon cœur battait fort. J’avais peur. Oui peur pour ce petit carnet qui m’était vraiment aussi précieux qu’un bijou.

Restant avec l’idée que j’avais dû l’oublier quelque part, je me mets à faire tout le tour de l’université. Je commençais par aller voir au terrain de foot. Je fis tout le tour du stade, des gradins mais rien. Je poursuivis mes recherches à la cafétéria. Je regardais partout sous les tables, les chaises, partout. Je devais vraiment passer pour une grosse débile à être comme ça à regarder partout, mais voilà, je tiens à mon carnet. Si je n l’ai pas sur moi, c’est tout le monde qui s’écroule. Je courais partout dans l’université. Vraiment partout, même dans les dortoirs des filles et dans la bibliothèque. Han !! Si on me l’avait chipé ! ET BRULE !! Tout sauf ça ! En plus, en tant qu’artiste, c’est mon petit objet fétiche ce carnet à dessin. Raaaah !! Il était où ! Bleu fluo avec des stickers dessus et mes idoles Kpop dessus je crois que quand même il fallait le faire pour que je ne le voie nulle part !

C’était encore plus la panique. Je ne savais plus où chercher. Je me pinçais la lèvre inférieure. L’après-midi arriva. Je n’étais toujours pas allé travailler à la bibliothèque, et j’avais sauté la scéance de modélisme. Oui je devenais folle là. Mais voilà, c’était une partie de moi-même que j’avais perdu, et je n’avais pas du tout envie que mon secret se répande partout dans l’université. D’une part ce ne serait vraiment pas bon pour la personne dont les nombreux portraits se trouvaient dedans, et d’autre part, je me sentirai coupable de le mettre dans une telle galère si ça courrait partout dans les couloirs. Je me sentais tellement mal, que je décidais d’aller prendre l’air.

Le ciel était devenu encore plus gris. Ca m’inquiétait encore plus. Pas pour moi, je pouvais être mouillée que ca ne me ferait ni chaud ni froid. Mais j’avais peur pour mon carnet. Une simple goutte et tout serait effacé. Je me retrouvais donc, la mine inquiète, me tordant les mains, dans les allées de la grande place centrale. J’avais même raté un entraînement de foot avec cette histoire. Ca m’attristait aussi ça. Mais pourquoi ai-je perdu ces dessins ! Et qui sait entre quelles mains, ils étaient arrivés ! Ô BOUDHA ! Fais en sorte que ce soit pas une personne pleins de mauvaises intentions !

Et puis, là, au loin, je vois une tâche bleue. Je le reconnais direct. Il n’est pas par terre mais entre deux mains masculines. Je ne fais même pas attention à qui ça peut être. Je les vois juste en train de regarder le contenu. Han ! Non ! Mon secret ! Je me précipite vers la personne pour récupérer mon carnet. Et là je m’arrête direct quand je fais enfin attention à la personne qui regarde mes œuvres. J’étais à deux pas de lui, je le fixais, les joues rougies par l’embarras. C’était… Le sujet même de mes dessins qui les regardait !

Si j’avais fait théatre, j’aurais joué parfaitement le rôle de la statue. Mon cahier était entre les mains que j’aimais le plus. Il était feuilleté par le garçon pour qui j’avais des sentiments très fort. Je sais, ça fait très fan girl dit comme ça, mais c’était vraiment sincère. Kyang Ja, je l’aimais et même mes amies ne le démentaient pas. Elles essayaient toutes de me pousser à aller le voir, lui parler, mais moi j’étais beaucoup trop timide vis-à-vis de lui pour faire quoi que ce soit. Du coup je m’étais contentée de le dessiner pour moi, juste pour moi. Même mes amies ne le savaient pas. C’était un secret de moi à moi. Mais mon secret m’avait échappé.

Mon cahier que j’avais perdu. Mon bien le plus précieux. Je n’aurai jamais dû le perdre en fait. Il l’aurait pas trouvé, il ne ferait pas cette tête. Il ne me prendrait pas pour une stalkeuse ni pour une folle. Je suis juste une fan… Non une fille qui l’aime. Oui je l’aime. Je suis juste trop timide pour aller vers lui, apprendre à le connaître…. Voilà ce que je ne cessais de me passer dans ma tête. Dans un sens j’étais plus que contente que ce soit lui qui l’ait retrouvé. Mais… J’étais quand même mi-figue mi-raisin. Sa réaction aussi était tout à fait compréhensible. Même si ce n’était que lui, lorsqu’il est dans les couloirs, lorsqu’il est à la bibliothèque, lorsqu’il est à la cafétéria et lorsqu’il est sur le terrain de football. Il a du même m’y voir là dans les gradins… Mais j’avoue que je me fais tellement discrète le concernant que je passe vraiment pour une folle.

Tae Yun… Ma pauvre Yunyun, t’es juste une petite idiote qui n’aurait jamais dû abandonné ton cahier. J’étais rouge. Oui rouge. Embarrassée, coupable, mal à l’aise. Ca devait même se lire sur mon visage. Je n’osais même pas le regarder dans les yeux. Juste par des regards rapides, timides et gêné. A sa place aussi j’aurais pas la joie. Et j’aurai dû me mettre à sa place avant. Dès le départ. T’as plus qu’à t’excuser. Et à cesser de faire ça ma tite Yunyun. Fini l’idylle ma belle ! Retombe dans la réalité. Ce qui devait resté secret ne l’est plus, et t’en paie radicalement les conséquences. Je me faisais aussi peut être des films, mais j’avais pas d’espoir de voir ce garçon me féliciter pour ça…

« Est-ce que par le plus grand des hasards, ce cahier est à toi ? »

La question fatidique surgit de sa bouche. Et moi ? Moi je n’osais pas répondre. J’avais peur. Et je ne voulais pas non plus le mettre plus en rogne que ça, en lui faisant perdre patience aussi. Alors je tendit une main timide, craintive et presque tremblante vers le cahier, lentement, pour le reprendre d’un geste doux, absolument pas brusque d’ailleurs.

« ….. Oui….. » Mais hors de question de rester sur ce oui, timide et tout craintif. « …. Désolée…. » Je serrais mes doigts bien fort sur mon carnet à dessin. Mon cœur battait très fort. J’avais honte. Très honte. « ….. J’suis désolée…. » Je n’arrivais même pas à dire autre chose. J’avais envie de fuir, là de suite. Mais mon corps ne voulait pas m’obéir. Alors je n’avais plus qu’à essayer de le convaincre que jamais je n’avais pensé à ça. Oui je suis une idiote finie. «…. Je… Je voulais garder ça secret….Je… J’ai bêtement égarer ça…. Je..... » Je reculais d’un pas, et je m’enfonçais… Yunyun tais toi ! Et fuis…

Je me pinçais la lèvre inférieure, détournant le regard, vraiment très gênée. Lui avait de quoi m’en vouloir, moi je m’en voulais. Et dire que je ne faisais que ça juste pour l’avoir toujours sous les yeux, parce qu’il m’envahissait la tête… J’arrivais même à le dessiner de tête, tellement j’avais appris par cœur les traits de son visage… Mais ce n’était vraiment pas le moment de penser à ça. La tête baissée, le regard fuyant, les joues rougies, l’air vraiment plus que repentant et honteux, j’attendais mon châtiment….

Je me sentais vraiment mal. Il avait une expression qui me mettait le doute et moi j’interprétais ça forcément comme une forme de début de colère. Alors je me mettais en mode toute gênée et embarrassée. Déjà de base j’étais mal à l’aise de le voir regarder mes croquis. Qui sait si je les avais bien fait ? Enfin… Je sais bien que j’ai un talent pour le dessin… Mais bon… Il pouvait aussi les trouver très moche. Bref, tout se mélangeait dans ma tête. Je me mettais à psychoter toute seule, et à me faire le pire film qui soit. Déjà que je suis timide de base… Là j’arrivais pas trop à maîtriser cette timidité.

Jusqu’à ce que Kyang Ja – oui je savais déjà son nom, vu que c’était écrit sur son maillot, que j’avais vu je ne sais combien de fois – prenne la parole en fait. Disons que je ne m’attendais pas trop à ça. Et ça me soulageait pas mal.

« Calme toi va, ça a beau être assez bizarre et inattendu c’est plutôt… Flatteur ! Et puis dis-toi que ça aurait pu être pire, si je n’avais pas récupéré ton cahier, difficile de garder ton secret… Secret ? »

Je me détendis d’un coup. Ouf ! Il ne m’en voulait pas. ‘Fin même si je savais que ça pouvait vraiment faire bizarre de se savoir dessiné comme ça.

« Oui… J’imagine que ça doit faire bizarre… » Je passais ma main sur ma nuque, un peu moins crispée. Toujours légèrement timide, vu qu’il s’agissait quand même de mon footballeur préféré… « Mais bon… C’est sûr que je pense que j’aurais été totalement perdue, si ça avait été un autre élève de l’université qu’il l’avait trouvé…. » Tenant toujours le cahier dans mes mains, vraiment comme un truc précieux « … Et puis qui sait ce qu’il se serait passé alors... J’crois que si ça avait fait l’objet d’une rumeur, écrite partout sur les murs, je m’en serais vraiment voulu…. »

En même temps, quelle idée de ne dessiner qu’un seul type ! Et qui plus est de le perdre et de le garder aussi secret ! Oui parfois je ne réfléchis pas beaucoup… J'avais fait ça poussée par mes sentiments, sans même avoir songé plus tôt que ça pouvait vite faire du bruit si je le paumais. Je l’avais rejoint et me mis à marcher à côté de lui. Encore toute timide bien entendu, vu que je n’allais pas me mettre à faire l’enjouée de suite. Alors que ça faisait à peine 2 minutes que je commençais à… lui parler… pour la première fois…

« Ne t’inquiètes pas, j’oublie ce que j’ai vu si tu veux. Et je ne te poserai pas non plus la question gênante de : pourquoi tu fais ça. Tu peux me dessiner si tu en as envie, mais pas en cachette d’accord ? Demande le moi. Je n’ai jamais mangé personne. »

Ou… Oublier ? Mais pourquoi ? Nan mais c’est vrai ! Il était l’objet de mon secret ! Il pouvait s’en rappeler s’il le voulait hein ! Je rougis un peu… Non…. Ne demande pas du tout pourquoi… Enfin…. Tu dois déjà avoir une idée hein…. Fin… J’veux dire une fille qui dessine que le même profil, ça veut tout dire quand même…

« Hum… En fait… Ça ne me dérange pas que tu le saches… Au fond…. T’es le sujet même de mon secret, alors… Fin… C’pas comme si t’allais crier sur tous les toits que je tenais quelque chose de secret qui… Te concerne. Et puis… J’avoue que ça fait un peu stalkeuse de dessiner en cachette… » Je souris doucement, amusée par ce que je venais de dire. « Et ok, je te demanderai l’autorisation la prochaine fois… »

En plus j’aurai pu le faire depuis le début… Juste trop timide pour approcher celui que j’admire et que j’aime… C’est bête hein ? Enfin bon… Tout de suite je me sentis déjà un peu mieux. Bah oui ! Le courant avait l’air de plutôt bien passer… Alors j’avais un peu moins de raison de rester muette comme une carpe et toute crispée ! Tiens d’ailleurs je ne me suis pas présentée. Ca serait peut-être le moment de lui dire comment s’appelle sa fan girl n°1…

« …. Au fait, moi c’est Tae Yun... Myeong Tae Yun. Encore désolée de t’avoir dessiné comme ça, sans rien dire… »

Bah ouais quoi… A sa place, j’aurai trouvé ça gênant aussi !

Il me mettait vraiment à l’aise. Ou alors le contact entre nous deux s’était juste fais de façon simple. D’ailleurs j’arrivais enfin à sourire franchement et à être parfaitement détendue. C’est bien mieux non ? D’autant qu’il avait lui aussi trouvé marrant le coup de ma comparaison avec la stalkeuse. « Dans ce cas-là, c’est d’accord, et plus tard, je tirerais les conclusions qui s’imposent. » Hein ? Mais… De quelles conclusions il parle ? Je feignais de ne pas du tout comprendre de quoi il parlait. « Hum… Pense ce que tu veux !... J’m’en fiche… » Je jetais des regards en sa direction pour juger de sa réaction, mais je gardais toujours cet air feignant le fait que ce n’était pas du tout ce qu’il croyait. Maaah… Je ne me faisais pas vraiment d’illusions. Je m’excusais encore de l’avoir dessiné en secret…

« Tu vas arrêter de t’excuser oui ? Tu préfères que je me mette en colère ? » Et devinez ce que j’allais faire ? Dire « désolée » ! Du coup j’ai fait la carpe. J’ai ouvert un peu la bouche pour la fermer tout aussi vite et faire comme si je m’éclaircissais un peu la voix. Il ne me lâchait pas du tout du regard… Du coup moi je lui jetais des regards par intermittence. Et non je refusais catégoriquement de le voir se mettre en colère… Mais en réfléchissant, penchant un peu la tête sur le côté, faisant une moue tandis que je me demandais comment il était quand il était en colère… Un sourire amusé apparut sur mon visage et là je me dis que ce serait drôle de voir sa réaction. Alors pour plus le taquiner qu’autre chose : « … Désolée ! Ah zut... »

Je savais qu’il allait comprendre que je le taquinais… Ou plutôt mon petit doigt me le disait. Surtout que je me retenais de rire là. Parce que oui je trouvais ça marrant. Maintenant j’étais plus à l’aise. « Mais non je ne veux pas que tu te mettes en colère. Au contraire ! » Même si je m’attendais à un truc vraiment drôle. « C’est oublié Tae Yun, t’en fais pas. Moi c’est Kyang … J’imagine que je n’ai pas besoin de me présenter ?» décidément il est amusant en fait. « … Kyang Ja ? C’est ça nan ? » Nan mais je savais que c’était ça. Moi aussi là je me mettais à le taquiner. Oui je sais, je ne suis pas restée longtemps timide hein ? Et maintenant il fallait s’attendre à ce que je devienne curieuse…

Je regardais un peu plus sa tenue… Il était en tenue de sport là. Alors forcément une seule question me vint à l’esprit : « Tu veux qu’on aille boire quelque chose ? » Je levais aussi les yeux un peu «… en plus il risque de pleuvoir. » Bon ce n’est pas que j’n’aime pas la pluie hein ! Mais… Mon sac n’est pas imperméable. Et j'avoue, ça faisait aussi recherche d'un prétexte bidon~.

Pas le temps de trainer, je l’attrape par la main et l’entraine vers la cafétéria qui donnait sur la place. « Bon alors ? Tu veux boire un truc ? » J'insiste à peine et ça se voit hein ? Et non je ne cherche pas à me faire pardonner, juste que j’imagine qu’il a soif lui… C’est tout… Et puis quoi ? On ne va pas rester là comme ça… Et puis je ne sais pas quoi faire sinon ! Bon allez à part ça autant savoir ce qu’il étudie à l’université hein ? Ouais je veux le connaitre. Ce sera déjà un bon début. « Sinon… T’es dans quelle filière ? » Ca fait vachement curieuse quand même… Mais j’avais plus le droit de m’excuser… Alors tant pis ! Et moi à force de parler, j’avais soif.

« Ah ouais ? T’es certaine de ça ? Comme tu veux alors, mais ne vient pas te plaindre après hein. »
Je fis une moue. Genre j’allais me plaindre parce qu’il aurait deviné que je n’ai que lui dans mes petits rêves de princesse… C’est mal me connaître. Enfin, pas étonnant non plus… Il vient à peine de me rencontrer, et moi je n’en savais pas plus que lui en fait. Je ne le connaissait qu’en tant que membre de l’équipe de football de Mangyo. Pas plus. Je n’appréciais en fait que son physique et sa capacité à être si gentil avec les fans qui venaient le voir lors des entrainements… Mais c’est tout. Moi je ne connaissais que ça de lui. Rien d’autre. Et cependant, j’étais bien prête à le connaitre plus en tant que personne. Déjà, j’étais devenue plus à l’aise et j’avais déjà commencé à le taquiner. Heureusement pour moi, il prend bien les choses. Au moins j’étais sure de ne pas me prendre une rouste… Nan parce qu’il y en a des gens qui n’aiment pas qu’on les taquine… Sa réaction me fit rire aussi.

Je l’invitais alors à aller à la cafétéria, pour cause de pluie imminente. Il ne voyait pas de problème. Et là, mon petit cœur s’emballe. J’allais prendre un verre avec le footballeur que j’aime le plus sur la terre. C’est… C’est juste inimaginable. J’en devins un peu plus nerveuse, même si je n’en perdis pas moins ma langue. Et je ne fais pas non plus attention à mes gestes. Je l’avais pris par la main, mais ce geste, m’avait semblé si naturel que je ne m’étais même pas interrogée sur la façon dont il allait le prendre. J’étais anxieuse, j’avais peur d’en faire trop aussi, de ne pas être tout à fait moi-même. Ca me faisait vraiment très bizarre. Et puis lui, avait sans doute remarqué cette nervosité. On s’asseyait et voilà qu’il soulignait le fait que j’m’étais répétée.

« Je crois que tu l’as déjà dis… On est pas là pour boire quelque chose déjà ? Je vais prendre un café. » La serveuse était déjà là et moi je n’avais même pas fait attention. Un café…. J’n’aimais pas le café. Mais chacun ses goûts hein… J’avais besoin d’un bon calmant. Et le seul qui existe pour moi c’était ce que je commandais du coup. « Un Ice Tea© pour moi s’il vous plait. » La dame nous laissa. Et là je sentis Kyang Ja me regarder. Hum… Là j’étais encore moins à mon aise. Je n’arrivais pas à garder mon regard sur lui. Mon palpitant n’arrivait pas non plus à se calmer. Me tordant les mains sous la table, j’avais donc pris les devants en lui demandant ce qu’il étudiait à l’université.

Là bien entendu, j’en profitais pour de nouveau apprécier les traits de son visage et tout et tout… « T’es dans le club de dessin rassure moi ? e.e… » Pourquoi « Rassure-moi » ? Je compris assez vite où il voulait en venir. Une fille qui dessine le mec de ses rêves parfaitement ne peut qu’être une pro du dessin donc forcément au club de dessin parce que sinon c’était flippant…

Ah… Mais… Allais-je le rassurer en lui disant que c’était ma matière principale ? Je ne pouvais pas le savoir avant de l’avoir dit. Mais je n’avais pas envie de lui donner la frousse. Du coup j’étais de nouveau tendue, crispée. Mon verre d’Ice Tea© arriva à ce moment précis. Je m’en saisis et m’adossant à ma chaise, le verre tenu entre mes deux mains et la paille dans la bouche, je tentais de me faire toute petite le temps de prendre une gorgée et de lui répondre, tenant toujours mon verre :

« Eh bien…. En fait… Je suis dans la filière Dessin et Peinture et je suis aussi les cours de Photographie…. Sinon je suis dans le club Mode…. » Paf. Tout sur la table. Plus qu’à attendre sa réaction. J’espérais qu’il n’allait pas avoir la chair de poule, sinon j’allais aussi me sentir mal. M’excuser encore n’était pas la meilleure des solutions. J’étais paumée… L’Ice Tea© était donc mon ami et je repris la paille, buvant mon verre à grande tirée de gorgée, le regard légèrement détourné.

Une fois calmée, je posais mon verre et préférais tenter de le rassurer.

« J’ai toujours aimé le dessin tu sais. Fin surtout la photographie. Mais ce qui me pousse là-dedans, c’est la mode. Le reste j’m’en fiche. Je ne veux pas apprendre à dessiner pour juste dessiner des gens ou des paysages, j’veux savoir ça pour… Devenir styliste… »

Prions pour qu’il n’ait pas encore plus peur, sinon je ne saurais vraiment pas quoi faire. Ou si… Juste lui donner le cahier. Comme ça… Les dessins reviennent au possesseur de l’identité représentée sur papier… C’était mon bijou, mais le savoir entre les mains de celui que j’admirais le plus me faisait moins de peine que de le savoir ailleurs…

« Et bien… Cela doit être intéressant ! Et en plus, tu as beaucoup de talent ! A ce que j’ai vu du moins… La réplique était plutôt ressemblante. »
Je souris. C’était un beau compliment. Très beau compliment, qui venait bien sûr de – bref vous m’avez suivie. Je lui souris et posa mon verre d’Ice Tea. « Merci pour le compliment. Et c’est vraiment intéressant. » J’avais alors envie de lui faire partager ma passion. « Je… J’pourrai t’apprendre si tu veux ? A dessiner ou faire des photos...» Et puis…

*Sblaaaaaaff*

Un son bizarre. Un son qui chatouilla mes timpans, alors qu’il couvrait presque la question que Kyang Ja me posait. J’avais réussi à le rassurer, j’étais soulagée de voir son visage se détendre un peu et de voir aussi qu’il voulait comprendre pourquoi cette voie. Mais voilà. Il a fallu d’un élément perturbateur pour que je fasse de nouveau la carpe. Mon sac avait été décroché de ma chaise et s’était totalement renversé par terre. « Eh merde… »

C’était le cas de le dire. Sans même faire attention aux types qui l’avaient renversé, je me précipitait par terre pour tout ramasser. Mais quand j’allais prendre mon cahier, une main s’en empara. Malheur. Mon cœur se mit à battre très très vite. Moi accroupie, je me relevais et osa alors lever les yeux sur le voleur. Je le reconnu direct. C’était pire que de la malchance. Je déglutis même. Je ne savais pas quoi faire et en même temps je détestais le voir se moquer d’une part de mes dessins et de la grosse ressemblance frappante avec Kyang Ja. J’étais dans la poisse et j’y avais aussi entrainé Kyang Ja.

« Vous voulez bien me rendre ça tout de suite s’il vous plait ? »
Celui qui tenait le cahier et que j’avais reconnu eut un sourire sarcastique. « Te le rendre ? Tu rigoles ? » Il continua de le regarder. Je sentis le besoin de réagir. Ayant fini de ranger toutes mes affaires, je posais mon sac sur la table et me mis face à la bande. Tendant la main :

« Il te sert à rien, rend le moi. »

En fait je crois que j’aurai du me taire. Laisser Kyang Ja se débrouiller. Mais j’avais pas envie de passer pour une chochotte. J’avais donné pendant des années. C’était pas la peine pour que je passe pour une trouillarde. Et puis, il détenait aussi ce qui m’était assez cher. Seulement j’aurai du me taire. Ce type m’avait reconnu direct. On avait fait le lycée ensemble. L’ex du lycée…. L’époque où je me trouvais moche. Ah ouais…. J’aurais vraiment du me taire. On avait rien fait ensemble. Tout ce que je faisais c’était le mener à la baguette pour le jeter juste après. Sûr qu’il ne m’avait pas oublié.

Il ferma le cahier d’un coup sec et leva la tête vers moi après avoir lu mon nom dessus… Un air haineux avait pris place sur son visage.

« Aaaaah…. Tae Yun….. Encore en vie ? Dommage que t’aies pas crevé à l’hosto. »

Paf. Mange toi ça Tae Yun. Je me mordis la lèvre. Il pouvait dire ce qu’il voulait… Je m’en fichais. Je me demandais juste ce que Kyang Ja allait penser. Et bien que je m’étais presque jurée de ne pas en parler, il avait fallu que je tombe sur cet abruti pour que le drame arrive.

« … Dommage hein ? » Dis je. « Ca t’aurais fait plaisir…. Mais change pas de sujet, rends moi mon... »

Il m’attrapa le bras, me lançant un regard froid « Hein ? Quoi ? J'entends pas bien... Nan mais d’où tu m’donnes des ordres ? Si tu veux que j’te le rende, fous toi à g’noux, comme tu m’forçais à l’faire avant ! »

La ferme. Je me retenais d'exploser en fait. C'était dur. Très dur. Parce que je savais aussi que Kyang Ja entendait tout. J'aimais pas du tout mon moi du passé, et là j'en subissais simplement les conséquences. Ce que j'avais voulu oublié, ressurgit d'un coup....

« T’es plus ma meuf, ni ma mère ou quoi qu’ce soit d’autre ok ? » Il regarda mon bras. Ma manche avait glissé. Rire sardonique « Tu t’es changée en sac d’os et t’es encore là.. gachis … »

Là c’était trop. « La ferme… » J'aurais du me taire aussi. Parce qu’il me lâcha et brandit mon cahier sous mon nez. « Ah ouais ? Bah dans ce cas… J’vais jouer avec… » Merde, il avait compris aussi que j’y tenais… Il avait sorti son briquet…

« Merci pour le compliment. Et c’est vraiment intéressant. Je… J’pourrai t’apprendre si tu veux ? à dessiner ou faire des photos...» Apprendre ? Pourquoi pas, je n’ai jamais vraiment été très doué dans ce domaine, et je dois avouer que j’aimerai bien savoir dessiner, cela pourrait être sympa.

« Oui, c’est une bonne idée, j’ai jamais été très doué, mais si j’ai une bonne professeur, alors ça change la donne. » Dis-je en lui souriant gentiment.

Ce petit moment de calme ne semblait pas franchement fait pour durer apparemment, car quelque chose, enfin quelqu’un vient tout foutre en l’air en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, je n’aurai d’ailleurs jamais imaginé que ce petit « incident » prendrait une telle ampleur. A la base, je voulais simplement récupérer le petit cahier de Tae Yun, c’est tout. « Te le rendre ? Tu rigoles ? » Non, je rigoles pas. Alors que je m’apprête à surenchérir, Tae Yun intervient : « Il te sert à rien, rend le moi. » Je la regarde, quelque peu surpris qu’elle y tienne à ce point, enfin disons que ça se comprends : « Aaaaah…. Tae Yun….. Encore en vie ? Dommage que t’aies pas crevé à l’hosto. » J’écarquille les yeux, les regardant l’un et l’autre alternativement : « Mwoya ? » Mais je passe plutôt inaperçu en fait, je croise les bras, et décide de ne pas intervenir pour le moment. « … Dommage hein ? Ça t’aurais fait plaisir…. Mais change pas de sujet, rends moi mon... » Mais de quoi parlent-ils ? Je suis un peu paumé, en même temps, je ne connais pas Tae Yun depuis longtemps, je dirais pour être exact juste 1 heures.
« Hein ? Quoi ? J'entends pas bien... Nan mais d’où tu m’donnes des ordres ? Si tu veux que j’te le rende, fous toi à g’noux, comme tu m’forçais à l’faire avant ! » Je soupire, je n’ai pas franchement envie d’assister à cet étalage de linge sale en public, et je plains Tae Yun qui ne doit pas forcément se sentir plus à l’aise que moi. Mais je ne dis rien, intervenant silencieusement, le faisant la lâcher, en le regardant méchamment. Cependant, ça ne le dissuade toujours pas, génial. « T’es plus ma meuf, ni ma mère ou quoi qu’ce soit d’autre ok ? Tu t’es changée en sac d’os et t’es encore là.. gachis … » Je fronce les sourcils, non mais il cherche quoi là exactement ? Je soupire de plus belle. « La ferme… » Je tourne la tête vers elle, surpris encore de cette réaction, ne l’ayant pas imaginé possible en fait. « Ah ouais ? Bah dans ce cas… J’vais jouer avec… » Quand je le vois sortir son briquet, je décide qu’il est temps d’intervenir. Je pousse Tae Yun doucement sur le côté, et viens coller mon poing droit dans la mâchoire de cette abruti qui tombe à la renverse. Je m’accroupit et récupère le cahier, shootant dans le briquet qui glisse plus loin.

« Je pense que ça va aller maintenant, tu t’es bien amusé, cela dit, ce n’est ni l’endroit ni le moment pour faire ce genre de chose, espèce de gamin. Je tapote la paume de ma main gauche avec le cahier de Tae Yun : Eh non, je rigole pas. » Dis-je en faisant référence à ce qu’il m’a dit un peu plus tôt.

J’attrape la main de Tae Yun et la tire avec moi en dehors de la cafétéria. Une fois que nous sommes assez loin, je m’arrête et lui rends son cahier, fermant ses mains dessus pour qu’elle ne le perde plus : « Est-ce que ça va au moins ? Il ne t’a pas fait mal ? » Oui parce que bon, il n’avait pas l’air d’y aller de main morte hein.

Je rêvais. J’avais les yeux gros comme des soucoupes. Kyang Ja venait de coller une droite au mec… Je n’en croyais pas du tout mes yeux. Je fermais les yeux et soupira de soulagement, mon cahier avait été sauvé. Et puis je me dis que Kyang Ja n’aurait pas eu à faire ça, si j’n’avais pas mis mon grain de sel. Et puis je savais qu’il avait tout entendu. Merci sale type… Bref.

« Je pense que ça va aller maintenant, tu t’es bien amusé, cela dit, ce n’est ni l’endroit ni le moment pour faire ce genre de chose, espèce de gamin. Eh non, je ne rigole pas. »

Jaja en colère… C’était la première fois que je le voyais comme ça. Ça donne froid dans le dos. Et en plus ça se voit qu’il ne rigole pas du tout. Mais tout ça a un peu tout gâché. Ou pas. Fin la première impression qu’il me reste c’est l’espèce de douleur que j’ai et le nœud dans la gorge à cause de tout ce qu’on m’a jeté à la figure. Je sais bien que j’ai pas été un ange à l’époque, mais se venger comme ça… Ca me donne la chair de poule. C’est comme si tous ceux qui ont subis mes tords par le passé avaient prévu de se jeter sur moi pour me lyncher. Ça fait peur. J’espère que ce type est le seul ayant eu l’idée de se venger… Remarque là il avait juste saisi la bonne occasion.

Je sentis alors qu’on me prenait par la main. Je sortis de mes pensées. Kyang Ja m’emmenait loin du champ de bataille, mon cahier dans l’autre main. Je me pinçais un peu la lèvre. C’était pas le moment d’avoir des bathumps bathumps juste en appréciant le contact de sa main ! Puis il pensait quoi hein maintenant de la Tae Yun… Bon allez, j’inspire et me calme. Tout ira bien. D’ailleurs une fois dehors il me met le cahier dans les mains, me forçant à le serrer très très fort. Il me demanda si j’allais bien.

Non.. Oui.. Non. Raaah ! Je ne savais pas. J’avais toujours la gorge serrée. Pas l’envie de pleurer heureusement, puis il y avait aucune raison. Mais juste la gorge serrée de l’angoisse quoi. Finalement j’hochais la tête et répondis : « Ca va… Il ne m’a pas fait mal. » Faux ! Je tirais sur la manche de mon bras gauche, bras qui avait été pris par la brute. J’n’avais pas non plus envie qu’il voit que j’avais le poignet plus fin que la moyenne nationale. Je regardais ensuite mon cahier. Finalement il m’attirera que des malheurs surtout si je suis aussi maladroite. Je soupirais et finis par l’aplatir doucement sur le torse de Kyang Ja. Pour qu’il le prenne. « Prends-le. Si je le garde encore qui sait ce qu’il va arriver. J’suis beaucoup trop maladroite, j’ai pas envie de t’attirer des problèmes avec ça… »

J’avais vraiment peur en fait que ça recommence ce genre de truc. J’n’ai pas vraiment aimé qu’on rigole comme ça de mes dessins et de la tête de Kyang Ja, et qu’en plus ça conduise à l’étalage de tous mes tords et de ma maladie en public… Je me pinçais la lèvre. Je me retins de m’excuser, sinon j’allais encore passer pour la fille qui fait que ça. « … Puis bon. Au moins l’œuvre retrouve son modèle. C’est ce qui a de mieux. » Je lui souris.

« Si tu le dis alors… Eh bien, je vais te croire alors. » me dit-il l'air sérieux. Je me pinçais la lèvre. Ce n'était pas mon genre de mentir, mais je n'aimais pas non plus l'idée qu'il s'inquiète pour moi. Je me sentais désolée de lui avoir dit ça. Enfin bon. Tout ces évènements m'avaient plus que chamboulée. Retournée. C'était comme si le passé m'avait rattrapée. Je m'attendais à ce qu'il me parle de ce que le mec avait dit quant à mon comportement avec lui. Mais il ne me dit rien.

Il me rendit mon carnet. Ce maudit carnet qui toute la journée avait été cause de ce retournement mauvais de situation. Je n'avais pas de dent contre lui mais je commençais à penser que plus j'allais le garder sur moi, plus il allait m'entraîner dans les pires situations du monde. Alors je le lui donnais.... Offrais ? En tout cas, j'étais persuadée que le lui donner permettrait d'éviter de vivre de nouveau des situations gênantes.

Il me fixa un moment. Comme si mon geste le surprenant. Je soutenais son regard lui offrant un joli sourire. Et en toute modestie je lui expliquait que je donnais l'oeuvre à son modèle.

« J’en prendrais grand soin, tu n’as pas à t’en faire. Me dit-il en hochant la tête doucement : Et si jamais tu veux le récupérer, n’hésite pas, d’accord ? » Je ne voulais pas le récupérer. Je le trouvais très bien entre ses mains. Il était bien mieux avec Kyang Ja qu'avec moi. Cependant j'acquiesçait d'un mouvement de tête.

« Œuvre ? Dans le genre modeste, t’en tiens une bonne couche toi, hein ?» Il me rendit le sourire en un instant. Kyang Ja semblait avoir ce don. Remonter le moral des gens. J'avais même lâché un rire légé, faisant comprendre que j'avais compris qu'il se moquait. « Enfin, c’est vrai que tu es douée. » J'appréciais tout particulièrement ce compliment. « Merci pour le compliment » lui avais-je répondu.

Je l'aimais encore plus. Il était vraiment incroyable. Extraordinaire. Il rendait tout très simple. Qu'importe ce que j'étais dans le passé, j'étais ce que je suis maintenant. Et ma maladie, je la vaincrais. Voilà. Il m'annonça alors qu'il lui semblait avoir perdu quelque chose sans savoir quoi et qu'il devait y aller du coup. J'haussais un sourcil. Il était marrant. Il avait la sensation d'avoir quelque chose en moins mais il savait pas quoi ? C'était juste incroyable. J'eus un sourire amusé.

« On se voit plus tard, d’accord ?»

J'acquiesçais. « Avec plaisir !» Je lui souris.

«Et… Fais attention à ton bras, t’es aussi forte qu’une asperge, va pas te faire mal. » Un battement très fort à son clin d'oeil, un moment d'arrêt. Je ris doucement à son conseil et lui répondis : « T'inquiète, je ferais attention ! Bon courage pour tes recherches ! »

Je le regardais partir vers l'université, et puis pris la direction opposée, le coeur léger.

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THE END